Pour une intelligence artificielle vertueuse, transparente et équitable

Actualités Pour une intelligence artificielle vertueuse, transparente et équitable Dans un communiqué de presse du 12 Octobre la Sacem a annoncé qu’elle exerce son droit d’opposition¹ (opt-out) au profit de ses membres. Désormais, les activités de fouilles de données (data-mining) sur les œuvres du répertoire de la Sacem par les entités développant des outils d’intelligence artificielle devront faire l’objet de son autorisation préalable, afin d’assurer une juste rémunération des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique qu’elle représente. La Sacem rappelle que les outils de l’IA peuvent prendre différentes formes, cependant la plupart d’entre eux reposent sur des bases d’entraînement composées de différentes données, parmi lesquelles peuvent se trouver des œuvres protégées. L’usage de ces outils soulève dès lors de nombreuses questions en matière de respect du droit d’auteur, notamment lorsque ces bases d’entrainement, composées d’œuvres, sont utilisées pour procéder à des activités de fouilles de données. La Sacem précise dans ce communiqué qu’elle n’entend pas s’opposer au développement de l’intelligence artificielle, qui peut offrir de formidables opportunités aux créateurs de musique qui s’en saisissent comme un nouvel outil au service de la création. Cependant, par le biais de cet opt-out, l’objectif poursuivi par la Sacem est d’établir un équilibre durable et vertueux entre les droits des créateurs et éditeurs qu’elle représente et les ambitions de développement des acteurs de l’intelligence artificielle. Lire le communiqué en intégralité
AI ACT : construisons maintenant une IA de rang mondial respectueuse de la propriété littéraire et artistique

Actualités AI ACT : construisons maintenant une IA de rang mondial respectueuse de la propriété littéraire et artistique Dans une Tribune signée par environ 70 organisations professionnelles, dont le Snac qui relaie cette démarche, le monde de la Culture demande à Madame la Première Ministre des garanties d’un réel engagement de la France dans le cadre du Trilogue sur le projet de Règlement Européen sur l’intelligence artificielle : “Avec l’installation du Comité de l’intelligence artificielle générative vous avez envoyé un message que nous partageons : l’IA marquera en profondeur nos sociétés, leur organisation et nos économies. De fait, les industries culturelles et créatives, qui représentent aujourd’hui 4,4 % du PIB et plus de 7,5 millions d’emplois dans l’Union européenne[1] se sont toujours construites en lien avec les évolutions techniques et technologique et continuent sur cette voie, l’IA ne faisant pas exception. La démarche que nous portons auprès de vous s’inscrit autant dans l’urgence que dans la responsabilité : le développement rapide des outils d’IA appelle l’adoption d’un cadre garantissant une réelle transparence sur les œuvres et les contenus utilisés pour entraîner les machines. A l’instar de la régulation des plateformes avec les textes successivement adoptés depuis 2018, la France et l’Europe ont aujourd’hui l’opportunité de proposer un cadre règlementaire équilibré pour ces nouveaux services à travers le projet de règlement sur l’IA. Nous saluons vivement l’introduction dans ce texte de dispositions spécifiques sur les IA génératives par le Parlement européen. Nous appelons la France à soutenir fermement ce principe de transparence dans le cadre du Trilogue, en s’attachant à préserver et perfectionner les apports de l’article 28b(4) plutôt qu’à coaliser une partie des Etats membres contre cet article qui porte la mise en place d’un cadre pour les modèles de fondation des IA. L’intelligence artificielle générative (IAG) n’existe que si elle peut se nourrir. Les contenus culturels et les éléments de la personnalité des artistes sont essentiels à cet égard. Or ces ressources à forte valeur ajoutée sont, dans leur très grande majorité, protégées au titre de la règlementation sur les données personnelles, d’une part, et du droit d’auteur et des droits voisins, d’autre part, qui valorisent et protègent les intérêts moraux et patrimoniaux des créateurs et des éditeurs tout en sécurisant les lourds investissements qu’elles sous-tendent. En effet, depuis plusieurs années, les IAG du type de ChatGPT utilisent de vastes quantités d’œuvres protégées, qu’il s’agisse de musiques, de photographies, de contenus littéraires ou de presse, pour entraîner leurs applications et générer de nouveaux contenus. Témoignent de cette utilisation la restitution de passages entiers d’ouvrages sous droit tels que « Harry Potter », la production de nouvelles œuvres reprenant le style d’un artiste, tels que Drake & The Weeknd, Angèle, Johnny Hallyday, pour ne citer que les exemples les plus visibles, ou la reprise de publications de presse protégées par les droits d’auteur et droits voisins. Des contenus alternatifs et potentiellement concurrents des originaux sont ainsi mis à disposition du public, sans pour autant que les services d’IAG concernés aient eu à assumer les investissements inhérents à la création littéraire et artistique. De fait, ces IAG constituent des sortes de « boîtes noires » qui ne permettent pas aux auteurs, à leurs cessionnaires et ayants droit de savoir si leurs œuvres ont été utilisées, à quelle date elles ont intégré le corpus alimentant l’IA et donc si leurs droits de propriété intellectuelle ont été respectés. Au contraire, il est très vraisemblable que les entraînements d’IAG se fassent depuis plus d’une dizaine d’années sans l’accord des titulaires de droit. Aussi positive que soit l’obligation de transparence pour les IA génératives introduite par le Parlement européen en mai dernier sous la forme d’un « résumé des usages concernant des œuvres protégées par le droit d’auteur », elle reste grandement insuffisante. Il est donc essentiel de la renforcer. Afin d’éviter un « blanchiment des données », et pour rendre possible la juste rémunération des ayants droit, nous souhaitons que soit imposé dans l’article 28b(4) le principe d’une transparence totale à travers une liste détaillée des œuvres utilisées par les systèmes d’IAG et leurs sources, liste qui doit être tenue à la disposition des titulaires de droit. La « petite musique » selon laquelle la transparence demandée par nos secteurs nous ferait rater le virage de l’IA est trompeuse : l’accès aux sources et la conservation des informations d’entraînement sont simples à mettre en place pour un développeur d’IA et constituent le préalable d’une relation vertueuse avec les titulaires de droits. Il ne s’agit donc pas de créer de nouvelles règles de propriété intellectuelle, mais d’assurer la mise en œuvre effective de nos droits (notamment en cas d’utilisation illégale, d’absence de prise en compte d’un éventuel « opt-out » ou de reprise par des entités commerciales de projets initiés à des fins de recherche), et d’être associés demain au partage de la valeur créée à partir de nos œuvres, de nos articles et de nos contenus. Sans un tel rééquilibrage de la situation, le risque est grand d’opposer une nouvelle fois acteurs de la culture et du numérique, alors même qu’ils appartiennent désormais au même écosystème économique. Nous avons une conviction : le développement d’une filière d’IA de rang mondial doit aller de pair avec le rayonnement de la création. C’est la rencontre des innovations culturelles et technologiques qui nous ouvriront des potentiels de croissance. La transparence n’en est que le prérequis. La parole du gouvernement français est toujours écoutée et souvent entendue quand il s’agit de concilier le développement du numérique et la protection des secteurs créatifs et culturels. Alors que la contestation des protagonistes de la création continue de monter dans le monde entier, y compris devant les tribunaux, la France doit encore une fois être au rendez-vous. Au vu de leur impact sur nos activités, les obligations de transparence que nous portons, et qui font l’objet d’un très large consensus au sein de nos industries, sont indispensables et ce dès aujourd’hui…” Comptant sur votre lecture bienveillante et votre engagement à défendre et promouvoir une ambition française pour la création à l’ère numérique, nous sollicitons un échange sans délai et vous prions de croire, Madame la
Face à l’intelligence artificielle – Un entretien avec Fabien Vehlmann, scénariste de bande dessinée, membre du groupement Bande dessinée du Snac.

Actualités Face à l’intelligence artificielle – Un entretien avec Fabien Vehlmann, scénariste de bande dessinée, membre du groupement Bande dessinée du Snac. Bulletin des Auteurs – En quoi l’intelligence artificielle peut-elle être une menace pour les auteurs ? Fabien Vehlmann – Au préalable je tiens à préciser que je ne suis ni un expert en informatique ni complètement à la pointe de la réflexion qui a lieu autour de l’intelligence artificielle. Je fais simplement partie des personnes qui se sont senties très vite alarmées. B. A. – Mais vous êtes expert en bande dessinée. F.V. – Je suis en effet scénariste en bande dessinée et j’aime bien réfléchir à des scénarios d’anticipation. Anticiper ne veut pas dire cependant avoir raison. Il est important pour moi de préciser d’où je parle et de ne pas laisser croire que j’en sais plus que les autres. B. A. – Dans la Bande dessinée nous avons plusieurs métiers. F. V. – Dans un premier temps je réagirais plus au nom des dessinateurs que des scénaristes. Mais nous sommes tous dans le même bateau, car ce qui concerne les dessinateurs concernera les scénaristes. Les intelligences artificielles ont franchi un cap technologique décisif. Les plus connues travaillent autour des illustrations, telles Dall–E ou Midjourney. GPT – 4 produit désormais aussi des textes cohérents et relativement pertinents. Pour le moment nous n’avons pas encore vu un scénario illustré créé par une intelligence artificielle. Mais il n’y a pas de raison que bientôt la complexité de la narration ne soit pas également résolue. Aux USA une autrice a déposé une bande dessinée, dont elle avait écrit le scénario, réalisée grâce à l’IA. Le Bureau américain du droit d’auteur est revenu sur sa décision d’accorder le copyright à cette œuvre, à la suite d’une plainte des artistes américains. Un manga conçu grâce à l’IA vient aussi d’être publié au Japon. Les illustrations qui sont produites par l’intelligence artificielle sur une thématique donnée, à partir de mots-clefs, sur simple commande, sans avoir besoin d’aucune connaissance graphique, peuvent être réellement très impressionnantes sur le plan de la qualité, avec un degré de finition qui peut complètement tromper le regard. Un professionnel pourrait certes y relever quelques gimmicks laissant soupçonner l’usage de cette technologie, mais à condition qu’il sache au départ que cette illustration provient d’une intelligence artificielle. Des questions éthiques et juridiques, voire métaphysiques, vont donc se poser. Peut-on parler de droit d’auteur quand « l’auteur » est un ordinateur ? Quid de la création assistée par ordinateur ? Nous utilisons déjà une telle assistance par ordinateur, ne serait-ce qu’en ouvrant Word. Il ne s’agit pas d’interdire les nouveaux outils technologiques, mais de les encadrer. L’utilisation, pour créer de nouvelles images, d’un fonds d’images qui appartient collectivement aux auteurs et autrices qui en sont à l’origine, peut être abusive, notamment quand elle s’apparente à un plagiat. La photographie est aussi concernée. Toute photographie mise en ligne sur une plateforme numérique grand public, y compris nos photos familiales, peut nourrir l’intelligence artificielle, y compris dans un but commercial. La manière dont fonctionnent les algorithmes de l’IA est absconse. L’atteinte à la vie privée cependant pourrait être constituée. B. A. – Quelles seront les conséquences pour les auteurs ? F. V. – D’abord économiques. On pourrait nous objecter : « Tous les métiers changent. Il faut s’adapter. » Or ce n’est pas parce que les métiers changent qu’on ne doit pas accompagner ces changement, afin d’éviter une casse sociale majeure, ce qui risque d’être le cas. La différence aujourd’hui, c’est la rapidité. Il s’agit de changements extrêmement brutaux, qui peuvent arriver en quelques années, qui ne laissent pas le temps de se retourner comme dans une évolution normale des métiers. Les autrices et auteurs de bande dessinée connaissent la précarité. Ils sont obligés de diversifier leur travail, et font souvent de l’illustration pour des magazines, des affiches pour des expositions, etc. Or ce type d’activité accessoire, concurrencée par l’intelligence artificielle, est potentiellement appelé à disparaître. Dans la reprise de séries, que j’ai moi-même pratiquée avec « Spirou », l’intelligence artificielle sera aussi capable de continuer une œuvre d’un auteur disparu avec un réel respect de son univers et de son style. Au Japon, le travail des assistants du mangaka, dans son studio, sera remis en question. Les décors en arrière-plan, les bases qui permettent au mangaka d’aller plus vite, pourront être confiés à l’intelligence artificielle. Or, être assistant permet d’apprendre le métier, et de devenir un jour mangaka. Enfin, les étudiants en école d’art peuvent être déroutés par des illustrations générées en trois minutes par l’intelligence artificielle, qui sont bien meilleures que ce qu’ils peuvent eux-mêmes produire en cinq heures de travail. B. A. – Vous parliez d’une dimension métaphysique. F. V. – Nous sommes là face à ce que certains philosophes ou psychanalystes appellent des « humiliations » de l’espèce humaine. Réaliser que la Terre n’est pas au centre de l’univers, ou que l’homme est cousin du singe, voilà d’autres exemples de cette blessure narcissique et philosophique, qui nous contraint à plus d’humilité. B. A. – Quelle réplique est-elle possible ? F. V. – La stratégie des start-up est trop souvent de lancer une utilisation plus ou moins légale, que les gens adoptent et qui devient ainsi légitime. Quand le nouvel usage s’est installé, il est trop tard pour s’y opposer. Il faudrait donc légiférer, et vite. L’Europe a ouvert une fenêtre avec une proposition de règlement sur l’intelligence artificielle. Cet « AI Act » concerne plutôt la sécurité, les deepfakes, pas tellement le droit d’auteur. Mais cette loi est en cours d’élaboration, de discussion, nous devons rapidement nous en occuper car ces intelligences artificielles gagnent en notoriété, en usage. The European Guild for Artificial Intelligence Regulation (Egair), qui a été fondée par des auteurs italiens de bande dessinée, groupés au sein du MeFu [Mestieri del Fumetto], s’y emploie, et nous pouvons soutenir son action. Une des grandes forces de l’Europe est la volonté de légiférer, dans tous les domaines. Si le processus des intelligences artificielles est bien encadré, les autrices et les auteurs seront ravis de pouvoir s’emparer de ces nouveaux outils. Des plasticiens le font déjà. Le problème de la fracture numérique pourra néanmoins s’accentuer : celui ou celle qui pourra acheter un logiciel très coûteux sera avantagé.e, quand
Les dangers de l’intelligence artificielle dans le domaine de la traduction – Un entretien avec Jonathan Seror, juriste de l’Association des traducteurs littéraires de France (ATLF)

Actualités Les dangers de l’intelligence artificielle dans le domaine de la traduction – Un entretien avec Jonathan Seror, juriste de l’Association des traducteurs littéraires de France (ATLF) L’ATLF et l’Association pour la promotion de la traduction littéraire [Atlas] publient une Tribune intitulée : « IA et traduction littéraire : les traductrices et traducteurs exigent la transparence », qui alerte sur les dangers imminents de l’intelligence artificielle dans le domaine de la traduction. Bulletin des Auteurs – Qu’est-ce que la « traduction automatique » ? Jonathan Seror – C’est la « transcription » d’un texte d’une langue source vers une langue cible, réalisée par un programme informatique. Le logiciel va utiliser un algorithme qui analyse une quantité colossale de traductions humaines déjà existantes lui permettant d’établir des correspondances entre des corpus de textes écrits dans plusieurs langues pour reproduire in fine des mots, des phrases, parfois des paragraphes, sur une base statistique. La machine se contentant d’ingurgiter et de régurgiter des fragments de textes sans en comprendre le sens, la plupart des traducteurs récusent le terme de traduction et préfèrent parler de transcodage ou de sortie machine (pour mettre en avant l’aspect informatisé et l’absence de pensée de la mal nommée « intelligence » artificielle) ou encore de pré-traduction (ce qui suppose l’intervention ultérieure d’un « vrai » traducteur). B. A. – Où en est aujourd’hui l’édition dans le domaine de la traduction automatique ? J. S. – L’ATLF a mené une étude auprès de ses adhérents dès la fin 2022. Sur un échantillon d’environ 500 traductrices et traducteurs, il apparaît que le recours à la traduction automatique demeure aujourd’hui extrêmement marginal dans ce secteur. Pour l’instant les éditeurs français ne revendiquent pas officiellement l’utilisation de la traduction automatique pour publier de la littérature étrangère. De l’autre côté, on sent une grande réticence du côté des traducteurs face à l’éventualité de cette pratique. Cependant, les quelques cas qui ont été remontés nous amènent à nous poser cette question : pourquoi un éditeur ferait-il appel à la traduction automatique ? La réponse est évidente : de son point de vue, ce serait pour réduire les coûts et gagner du temps. B. A. – Quels sont les questions que soulèverait la traduction automatique ? J. S. – Sur le plan juridique, le traducteur est un auteur. Il crée une œuvre de l’esprit originale, même si elle est dérivée d’une œuvre première. Ainsi à partir d’un même texte, chaque traducteur créera une œuvre différente selon sa sensibilité, sa voix ou son style. On peut dire qu’il y a autant de traductions qu’il y a de traducteurs. Pour en revenir à la traduction générée par la machine, on distingue souvent en matière de droit d’auteur l’amont de l’aval. L’amont interroge la manière dont a été nourrie la machine. L’aval s’attache au texte généré par la machine. En amont, les algorithmes d’une traduction automatique se nourrissent du « Big data », des « données massives », à travers le « Deep Learning », l’« apprentissage profond ». Les algorithmes vont ingurgiter une quantité colossale de textes, souvent accessibles en ligne, afin de pouvoir potentiellement les reproduire. Se pose alors la première question : Quels sont les textes qui nourrissent la machine ? S’il s’agit de textes protégés par le droit d’auteur, et que la machine reproduit de manière fragmentée des traductions préexistantes, le droit d’auteur des créateurs de ces traductions préexistantes est violé. Le problème est que les auteurs de traduction ignorent potentiellement l’appropriation de leurs créations par une machine. En outre, compte tenu du processus de retranscription parcellaire par l’IA, il est quasiment impossible de démontrer une contrefaçon (bien que cette violation du droit d’auteur s’apprécie au regard des ressemblances entre les textes, et non des différences). C’est pourquoi une transparence de la part des développeurs sur la matière qui est donnée à la machine permettrait de tracer de telles utilisations. C’est d’ailleurs ce que demandent les organisations d’auteurs au niveau européen dans le cadre de la proposition de règlement sur l’IA. Dans ce contexte, la crainte est d’autant plus renforcée qu’en droit français a été introduite une énième exception au droit d’auteur suite à la transposition des articles 3 et 4 de la Directive européenne 2019/790 relative au droit d’auteur : « l’exception de fouille de textes et de données », « Text and Data Mining » prévue par les article L122-5et L122-5-3 du CPI, qui permettrait d’ingurgiter des textes sans demander l’autorisation des auteurs, lesquels ne pourraient qu’opposer un « opt-out » que l’on sait aujourd’hui impossible à mettre en œuvre. Cette exception est encore récente mais la première crainte des traducteurs est de se dire qu’à terme ils contribueront, sans le savoir et par la spoliation de leur création, à nourrir l’IA. En aval, nous avons un texte généré par l’ordinateur, qui à ce jour n’est généralement pas exploitable en l’état du fait de la syntaxe et des erreurs de sens, sans parler de l’absence de construction littéraire. Pour obtenir un texte de qualité publiable, il faut donc faire intervenir un traducteur sur la sortie machine, dans un travail qualifié de « post-édition ». Quel serait alors le statut du traducteur ? Son rôle se limiterait-il à corriger les erreurs et les fautes orthographiques, grammaticales et syntaxiques du texte issu de la traduction automatique, auquel cas il ne serait plus qu’un prestataire de services et perdrait de ce fait sa qualité d’auteur ? Ou devrait-il effectuer un vrai travail de réécriture, devrait-il retraduire, et donc réaliser une création originale, même partielle ? Le curseur est délicat à placer et il y a fort à parier que l’éditeur et le traducteur n’auront pas la même vision des choses. B. A. – Le recours à l’IA et à la post-édition entraîne-t-il réellement un gain de temps ? J. S. – Il n’est absolument pas démontré qu’une réécriture à partir d’un texte issu de la traduction automatique générerait un gain de temps puisque le traducteur, au lieu de travailler sur un seul texte (à savoir la version originale) devrait travailler à partir de deux textes, la version originale et le texte issu de la traduction automatique. Ce va-et-vient permanent entre la version originale, la sortie machine et le texte final prend plus de temps qu’on ne le pense. Qui plus est, sur un plan littéraire, nombre de traducteurs pointent l’appauvrissement de la créativité dans ce processus laborieux : la
Alerter sur la problématique de l’Intelligence Artificielle générative (IAG) (à date du 18 juillet 2023)

Actualités Alerter sur la problématique de l’Intelligence Artificielle générative (IAG) (à date du 18 juillet 2023) Alerter sur la problématique de l’Intelligence Artificielle générative (IAG) (à date du 18 juillet 2023) Depuis des décennies, des auteurs et des compositeurs utilisent l’ordinateur comme outil et instrument accompagnant leurs créations. Mais aujourd’hui, les développements de ces technologies numériques ont abouti à des processus de productions d’artefacts (musiques, images, textes) qui ressemblent à des œuvres de l’esprit sans qu’il soit pourtant possible de leur attribuer un ou plusieurs auteurs clairement identifiables (des revendications existantes peuvent être contestées). Car ces contenus, fruits de calculs complexes, ne sont en aucun cas l’expression de « la vision personnelle d’un individu suscitant une émotion esthétique » (déf. d’une œuvre d’art selon le CNRTL, le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales). Cette « Intelligence Artificielle » générative (IAG), en plein essor « pour le bien de tous » selon ses acteurs, et qui ouvre en effet des champs des possibles considérables, représente pourtant deux types de menace pour les auteurs et les autrices : en aval du processus de création artificielle, la menace repose sur l’apprentissage de la machine prédatrice car elle se nourrit, entre autres, d’œuvres, ou d’éléments de celles-ci, protégées par le droit d’auteur sans consentement préalable des ayants droit ni même la moindre information, ce qui apparente cette pratique à du piratage, en amont, à la création des artefacts, la menace est directe sur l’activité professionnelle des créateurs et des créatrices que la machine concurrence. Et plus largement, le développement et l’usage mercantile de l’IAG au mépris de l’humain qu’elle cherche à remplacer, de la richesse de son intelligence, de son imaginaire et de sa sensibilité peuvent, à terme, appauvrir la créativité en détruisant des savoir-faire et des recherches de sens constitutifs de nos identités culturelles. C’est pourquoi, pour défendre l’existence même de graphistes, dessinateurs, traducteurs, scénaristes, documentaristes, cinéastes, compositeurs, romanciers, etc… tout en permettant le développement intelligent et éthique de ces réseaux de neurones générateurs, les auteurs, autrices, compositeurs, compositrices du Snac appellent à une régulation urgente du secteur. Les demandes des auteurs Mettre en place les outils techniques et juridiques nécessaires pour interdire l’absorption d’œuvres de l’esprit par des systèmes informatiques, à seule fin de grossir les bases de données nécessaires au fonctionnement de l’IAG, au profit d’entreprises marchandes et sans la juste compensation qui doit revenir aux auteurs et compositeurs. L’utilisation des œuvres protégées par le droit d’auteur, doit être précédée d’une autorisation explicite de la part de leurs auteurs (opt in). Pour les œuvres déjà exploitées de la sorte, possibilité doit être donnée aux auteurs de sortir du système (opt out). Exiger des engagements clairs et fermes de la part des décisionnaires de la Culture, y compris producteurs et éditeurs, à ne pas accepter des remplacements abusifs d’auteurs par des « contrôleurs qualité » des produits générés artificiellement. Exiger des pouvoirs publics, en particulier, qu’ils ne consacrent pas d’argent aux projets qui visent à remplacer des professionnels de la Culture par des générateurs artificiels reproductifs. Mettre en place des systèmes d’information du public sur l’origine artificielle ou humaine des contenus qu’il lit, écoute, regarde et qui alimente son imaginaire intime et profond. La transparence et la traçabilité des contenus générés doivent être la règle. Initier le lancement par les pouvoirs publics d’une réflexion la plus large possible sur la concurrence déloyale que constitue l’utilisation de l’IAG au regard des créations humaines, ainsi que sur les conséquences psychosociales pour le public, pour la diversité culturelle et pour le patrimoine culturel de demain.
Webinaire les auteurs en actions : assignation identitaire catégorie “francophone”

Actualités Webinaire les auteurs en actions : assignation identitaire catégorie “francophone” La vidéo du second webinaire du SNAC sur la liberté de création et assignations identitaires est disponible, elle portait plus particulièrement sur la catégorie “francophone”, mais aussi sur la question de la discrimination et de l’appropriation culturelle. Regarder la vidéo
Rappel des engagements et valeurs du SNAC – juin 2023

Actualités Rappel des engagements et valeurs du SNAC – juin 2023 Le SNAC est un syndicat professionnel dont la mission, définie par ses statuts, est de représenter les auteurs et les compositeurs dans divers secteurs de la création : Audiovisuel / Bande dessinée / Doublage – Sous-titrage et audiodescription / Musiques (contemporaines, à l’image, actuelles) / Lettres / Théâtre-Danse-Scénographie. Il intervient sur tous les sujets qui concernent le droit d’auteur : sa défense, le soutien de ceux qui en assurent la pérennité, y compris les sociétés et organismes de gestion collective. Le Snac intervient également sur toutes les questions sociales et fiscales concernant les auteurs et les compositeurs. Aux termes de ses statuts, des dispositions du Code de la propriété intellectuelle, de son ancienneté, et de son adhésion à la Fédération du spectacle, le Snac a qualité à représenter, à titre collectif, les auteurs et les compositeurs visés dans son objet social. Le SNAC a également qualité pour assister, conseiller et représenter, à titre individuel, les auteurs et les compositeurs dans le cadre des litiges (y compris contentieux) qu’ils peuvent avoir. Il répond à leurs demandes d’informations sur les diffuseurs de leurs œuvres ou sur les diverses instances publiques. Il agit seul, ou aux côtés de toutes sociétés, associations, syndicats, poursuivant les mêmes objectifs de défense des intérêts des auteurs et/ou des compositeurs. L’unité et l’efficacité dans l’action commune supposent, dans le respect des différences d’approche de chaque organisation, la recherche des compromis et des consensus. Le SNAC privilégie donc systématiquement le dialogue et la concertation. Profondément attaché à la liberté d’expression et de création, socle de notre démocratie et dont le cadre est défini par la loi, le syndicat entend soutenir toute créatrice et tout créateur contre toute personne ou tout groupe de pression, public ou privé, qui viserait à les censurer, à imposer des normes esthétiques, politiques ou morales, et à interdire tout débat. Il en résulte que le SNAC ne saurait rester silencieux, sur tout sujet professionnel posé par ses adhérents ou qui doit être mené dans l’intérêt de la collectivité des auteurs représentés par lui. Lire le texte en intégralité
Infos utiles SSAA : la Sécurité Sociale des Artistes-Auteurs

Actualités Infos utiles SSAA : la Sécurité Sociale des Artistes-Auteurs Établir une facture en tant qu’artiste-auteur : petit rappel de ce qu’il faut savoir La facture d’un artiste-auteur est une note détaillée de ses prestations ou de ses ventes. Il s’agit d’un document de nature juridique, commerciale, comptable et fiscale. Elle doit comporter certaines mentions obligatoires. Lien : https://www.secu-artistes-auteurs.fr/mag-facture-artiste-auteur Modèle note de droits d’auteur http://www.snac.fr/site/wp-content/uploads/2023/06/Modèle-de-note-de-cession-de-droits-dauteur-2022.xlsx Modèle facture http://www.snac.fr/site/wp-content/uploads/2023/06/Modele-facture-artiste-auteur-0523.docx
Bureau SNAC : BESSORA, réélue présidente du Snac

Actualités Bureau SNAC : BESSORA, réélue présidente du Snac À l’issue de son Assemblée générale du 16 juin 2023, Bessora* a été réélue Présidente du Syndicat national des auteurs et des compositeurs pour l’exercice 2023-2024. Le Bureau du Snac est ainsi constitué pour le nouvel exercice : Présidente BESSORA Vice-président·e·s Auteurs·trices : Marc-Antoine BOIDIN – Gérard GUÉRO – Nicole MASSON – Christelle PÉCOUT – Michèle ROTH-GERVAIS Compositeurs·trices : Siegfried CANTO – Christian CLOZIER – Joshua DARCHE – Jean-Claude PETIT – Patrick SIGWALT – Béatrice THIRIET Trésorière : Béatrice THIRIET Trésorier adjoint : Joshua DARCHE Président·e·s d’honneur (membres de droit du Bureau) : Pierre-André ATHANÉ – Maurice CURY – Simone DOUEK – Claude LEMESLE * Bessora est née à Bruxelles, elle a grandi en Europe, aux Etats-Unis et en Afrique. Diplômée d’HEC Lausanne, elle est salariée quelques années dans l’audit puis la finance à Genève, avant de reprendre des études à Dauphine, Paris VII, et l’école des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Elle soutient une thèse en anthropologie en 2002. Autrice dans différents secteurs du livre, Bessora est aussi traductrice et ghost-writeuse. Elle a publié une vingtaine de textes. Élue au Conseil d’administration du RAAP en 2018, elle est présidente du Conseil permanent des écrivains de 2019 à 2021, administratrice du CNL depuis 2020 et représente le Snac dans le conseil d’administration de la Sécurité Sociale des Artistes-Auteurs.
Auteurs en Action : Liberté de création et Assignations identitaires #2

Actualités Auteurs en Action : Liberté de création et Assignations identitaires #2 Liberté de création… un droit qui nous semble acquis ! Pourtant, entre un principe et son application, un écart peut insidieusement se creuser. Le Snac a décidé de s’emparer de ce sujet d’actualité en le confrontant au phénomène de plus en plus prégnant des assignations identitaires. Trop souvent, elles sont synonymes pour les auteurs du livre d’injonctions de contenus. Une nouvelle série de webinaires d’Auteurs en Action se donne pour objectif de débattre, et d’interroger les pouvoirs publics, la chaîne du livre, les médias et les institutions culturelles. Catalogage, éléments de langage marketing, classifications universitaires, lignes éditoriales, obsessions médiatiques, autocensure, voire censure… nous interrogerons ensemble les pratiques des acteurs du secteur pour trouver, collectivement, comment prévenir les dérives. Deuxième RDV le 23 juin à 18h Pour participer, inscrivez-vous ! Ce n°2 sera l’occasion d’interroger, avec différents acteurs de la chaîne du livre, le concept de francophonie et de voir comment les catalogages, les logiques de classification, induisent des assignations identitaires qui opèrent sur la création et la réception des œuvres des auteurs dits “francophones”. Les grands témoins : EMMANUEL JASLIER Directeur des métadonnées de la Bibliothèque Nationale de France ELGAS Journaliste, écrivain et docteur en sociologie. Il s’intéresse particulièrement aux questions d’identité, de démographie et de démocratie sur le continent africain, et à ses rapports avec la France. AMANDA SPIEGEL Membre du Syndicat de la Librairie Française et directrice de la librairie Folies d’Encre, à Montreuil. WILFRIED NSONDÉ Écrivain et chanteur. SHUMONA SINHA Écrivaine. Participeront également à ce webinaire : JEAN-LOUP AMSELLE Anthropologue et ethnologue, il est directeur d’études émérite à l’EHESS, ancien rédacteur en chef des Cahiers d’études africaines. ALISON RICE Professeure de “French and Francophone Studies à l’université Notre-Dame. Et des représentants du SNAC, bien sûr ! Vous pouvez nous envoyer dès aujourd’hui votre témoignage ou vos interrogations auteursenaction@snac.fr. L’émission sera enregistrée pour diffusion et le nombre de participants est limité.