La Réforme de la TVA – Une note collective des organisations du secteur culturel

Actualités La Réforme de la TVA – Une note collective des organisations du secteur culturel Dans le cadre de la concertation interministérielle et interprofessionnelle en cours, nous, syndicats professionnels, organisations professionnelles et sociétés d’auteurs, rappelons nos positions à travers cette note écrite : nous nous élevons fermement contre l’amendement I-2233 de la loi de finances 2025, initialement proposé par le Sénat et ayant pour objet d’abaisser les seuils de la franchise en base de TVA à 25 000 euros dans un objectif d’harmonisation des seuils existants ; mesure actuellement suspendue. Pour rappel, en vertu des seuils actuellement en vigueur, la franchise en base de TVA spécifique aux auteurs d’œuvres de l’esprit, leur permet de ne pas soumettre leurs revenus artistiques (incluant les droits voisins des artistes interprètes pour ceux cumulant les deux activités) à la TVA, lorsque le montant de leurs revenus n’excède pas 50 000 euros pour la livraison d’œuvre et la cession de droit d’auteur, et 35 000 euros pour les autres activités des auteurs. Les auteurs bénéficient en outre d’un dispositif spécifique dénommé « retenue de TVA » lorsqu’ils perçoivent leurs droits d’auteur de la part d’éditeurs, de producteurs ou d’organismes de gestion collective ; permettant que ces revenus soient soumis à TVA quel qu’en soit le montant, tout en étant déchargés de toutes les obligations des redevables de la TVA, ces obligations étant reportées sur les débiteurs de droits d’auteur. Ces seuils augmentent depuis plusieurs décennies, d’année en année, pour correspondre à la réalité économique du secteur culturel. En effet, la France, qui a toujours défendu l’exception culturelle, reconnaît la création artistique comme un bien essentiel devant être protégé des logiques purement marchandes. Elle a donc développé pour le secteur, des dispositifs spécifiques pour encadrer la création d’œuvres de l’esprit ainsi que leur exploitation, ce qui implique un savoir-faire singulier et une sensibilité artistique indéniable. La réforme visée, telle qu’elle est proposée sans considération des spécificités de l’activité artistique, risque d’avoir des conséquences délétères sur les auteurs et donc, sur la création, puisqu’inadaptée en tout point à la réalité économique de leur secteur, notamment pour les raisons suivantes : En 2022, plus de 268 000personnes percevaient en France des revenus d’auteur[1]. Il est essentiel de rappeler leur nature particulière : n’étant ni des revenus commerciaux, ni des salaires ou cachets, et n’ouvrant donc pas de droits au régime de l’intermittence, les rémunérations perçues par les auteurs sont marquées par une très forte irrégularité, consubstantielle à l’activité de création : une œuvre conçue en année N, peut générer des droits d’auteur (« royautés » ou « royaltie ») importants en année N+2, après qu’elle a été exploitée (quand elle est vendue ou après sa diffusion), mais aucun en année N+3. Cette imprévisibilité peut conduire à rendre un auteur redevable de la TVA de manière temporaire car cela dépendra toujours, chaque année, du nombre d’œuvres exploitées et des revenus qu’elles génèrent pour l’auteur, sachant de surcroît que le chiffre d’affaires à prendre en compte inclut également les droits voisins des artistes interprètes générés par les exploitations des enregistrements qui sont soumis aux mêmes variations aléatoires que les droits d’auteur. L’introduction d’une obligation de gestion de la TVA, pour un chiffre d’affaires non rentable et aussi bas que 25000 euros, ne ferait qu’alourdir la complexité administrative à laquelle sont déjà confrontés les auteurs, notamment au regard de leur statut fiscal et social très particulier. L’abaissement du seuil à un tel montant aurait donc pour effet de faire rentrer nombre d’auteurs professionnels dans le régime de la TVA, avec toutes les obligations administratives qui y sont attachées. Or, les auteurs consacrent déjà une part excessive de leur temps à la gestion administrative de leur activité, bien supérieure à celle d’autres secteurs, celle-ci étant d’autant plus forte pour les auteurs qui sont généralement pluriactifs et soumis à des statuts différents. La gestion de la TVA nécessiterait ainsi des services comptables, souvent inaccessibles à de tels niveaux de revenus, et renforcerait ainsi la précarisation d’un secteur dont les gains sont déjà très modestes. Les études disponibles sur la condition des auteurs attestent en effet d’une précarité structurelle de la profession, qui se retrouverait fortement aggravée par cette baisse du seuil de franchise en base de TVA. Les auteurs percevant des revenus artistiques entre 25000 euros et 50 000 euros se situent dans une tranche critique de développement professionnel : leurs imposer de nouvelles charges risquerait de freiner leur progression, voire de les dissuader de poursuivre leur activité. Nombreux sont les auteurs qui collaborent avec des structures qui ne récupèrent pas la TVA (salons, festivals, écoles, bibliothèques, collectivités territoriales, établissements publics,). En cas d’application d’une TVA s’ajoutant au prix facturé, ces diffuseurs seraient contraints d’augmenter leur budget ou de réduire leur recours aux auteurs. Le risque est donc grand de compromettre la présence des auteurs lors de ces événements pourtant essentiels à leur visibilité et à leur rémunération. Une telle réforme menacerait de fait la diversité et l’accessibilité de la culture. Le passage à un seuil unique de franchise de TVA s’inscrit dans une dynamique de standardisation européenne méconnaissant la singularité de la création artistique en France. La justification de cette mesure, à savoir l’existence de distorsions de concurrence à l’échelle européenne, n’a pas lieu d’être s’agissant du secteur des artistes auteurs, puisque la concurrence entre auteurs des États membres est faiblement perceptible, voir totalement insignifiante, en comparaison avec d’autres secteurs, notamment en raison de la circulation des œuvres en Europe et dans le monde, à travers la traduction (les traducteurs étant des auteurs et donc soumis aux mêmes régimes visés dans la présente note). Alors que les réformes successives ont progressivement augmenté les seuils de franchise de TVA pour les auteurs, cet amendement marque un revirement brutal et en parfaite contradiction avec les politiques menées ces dernières années pour soutenir le secteur de la culture. La directive (UE) 2020/285 permet aux États membres de fixer un seuil de franchise jusqu’à 85 000euros. Contrairement à une interprétation rigide de l’harmonisation fiscale, la France conserve donc une marge de manœuvre significative pour maintenir un seuil de franchise TVA adapté aux Ainsi, si nous comprenons les objectifs de simplification

Appel à la manifestation intersyndicale du 1er mai

Actualités Appel à la manifestation intersyndicale du 1er mai Chères toutes, Chers tous, Le Snac se mobilise pour la grande manifestation à Paris du 1er mai. Cette année, l’intersyndicale (CGT, FO, Solidaires et la FSU) prévoit une manifestation unitaire placée sous le signe de la paix et de la justice sociale, dans une période de profonde gravité pour la démocratie, pour les droits sociaux. Le départ est prévu à 14:00 place d’Italie, traversera la Seine au Pont d’Austerlitz et finira place de la Nation. Nous vous donnons rendez-vous à partir de 14:00 au café « Le Soleil d’Austerlitz » pour rejoindre le défilé. Lien Google Maps :  A demain ! Le Snac

9e art+ : la bulle est pleine !

Actualités Nous l’avons relevé lors de la dernière édition 2025 du Festival International de la BD d’Angoulême (FIBD), le monde de la bande dessinée s’interroge depuis longtemps sur la gestion du festival, comme l’a très justement souligné Lucie Servin dans son article du 24 janvier 2025 dans L’Humanité 1, largement relayé par l’ensemble de la presse et qui ne fait que confirmer nos intuitions.   Dans quelques semaines, en mai prochain, la convention entre le FIBD et 9e Art+, qui gère le festival depuis 2007, est censée être renouvelée de manière tacite jusqu’en 2037 ! Il n’est plus possible de laisser se renouveler cette convention en l’état actuel de la situation, la société 9eArt+ étant donc soupçonnée de partenariats incongrus, de montages financiers opaques, d’un endettement faramineux, d’un management toxique, de népotisme, ainsi que de négligence envers une employée annonçant être victime de violences sexistes et sexuelles. Toute convention publique doit de toute façon et en toute hypothèse, faire l’objet d’un appel d’offres : le FIBD ne peut échapper à la règle Nous demandons donc à l’association ADBDA de lancer enfin un appel d’offres pour la gestion du FIBD et aux pouvoirs publics – notamment aux pouvoirs locaux, grands pourvoyeurs de fonds pour ce festival – de tenir compte de la colère légitime des auteurs et autrices de BD et de prendre leurs responsabilités en exigeant une étude approfondie du fonctionnement de la société 9e art +, ainsi que le lancement de cet appel d’offres. Liste des signataires : AAA (Autrices et Auteurs en Action)ABDIL (Fédération professionnelle des auteurices de la Bande dessinée et del’Illustration)BD EgalitéCharte des auteurs et illustrateurs jeunesseCPE (Conseil permanent des écrivains) : ADAGP, ATLF, COSE-CALCRE, EAT, LA MAISON DEPOÉSIE, PEN CLUB, SACEM, SAIF, SAJ, SCAM, SELF, SGDL, SNAC, UPP, UNION DES POÈTES.Ligue des Auteurs ProfessionnelsMeToo BDSNAC (Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs)

Communiqué du Conseil d’administration de la Sécurité Sociale des artistes auteurs

Actualités Communiqué du Conseil d’administration de la Sécurité Sociale des artistes auteurs Les organisations membres du Conseil d’administration de la Sécurité Sociale des artistes auteurs regrettent une obstruction empêchant leur travail au service des artistes auteurs. Le mardi 11 mars 2025, aurait dû siéger le conseil d’administration de la 2S2A, Sécurité sociale des Artistes Auteurs. Les administrateurs, tous bénévoles, il convient de le rappeler, ont été interrompus par la manifestation d’une trentaine de militants de la CNT et de la CGT-Spectacle, décidés à empêcher la tenue du conseil. Ces manifestants, refusant tout échange en dépit des tentatives de plusieurs administrateurs, ont préféré lancer des attaques et des menaces ad hominem à l’encontre de certains administrateurs et de représentants de l’État. Organisations d’auteurs et autrices : L’intrusion a empêché le conseil d’administration de travailler concrètement et urgemment sur le rachat des cotisations de retraites prescrites, sujet brûlant qui mobilise les énergies du CA depuis des mois. L’élection d’un nouveau membre de la Commission d’Action Sociale devait en outre se tenir, elle n’a pu avoir lieu. Les organisations du CA regrettent vivement cette obstruction à leur travail. Tous représentants d’organisations d’artistes-auteurs et de diffuseurs, et bien souvent artistes-auteurs eux-mêmes, sont pleinement engagés pour améliorer collectivement notre protection sociale : lutter contre la précarité que connaissent nombre d’artistes auteurs et contre leurs difficultés à accéder à une vraie protection sociale, notamment pour les arrêts maladie ; pallier les aléas que trop d’entre eux ont longtemps subis dans l’acquisition de leurs droits à la retraite et les dysfonctionnements dans leurs possibilités de les régulariser. Ce sont autant de sujets qui méritent mieux qu’une obstruction sans lendemain. Le Snap-CGT, qui siège pourtant au sein du CA, conteste le mode de désignation des administrateurs. C’est naturellement son droit mais la méthode et la temporalité interrogent. Pour rappel, le conseil d’administration de la 2S2A est composé de 16 organisations représentantes des artistes-auteurs, désignés par les deux ministères de tutelle de l’établissement en fonction de critères stricts de représentativité des métiers et des secteurs. Contestée en justice, la composition de ce CA a été jugée parfaitement conforme par le tribunal administratif. Elle inclut par ailleurs un large panel de métiers divers et variés. Cette façon d’agir plonge les administrateurs dans une grande perplexité. Certains ciblent ainsi une structure qui pourtant travaille à se redonner les moyens d’avancer. Les administrateurs nouvellement nommés tiennent à souligner qu’ils sont parfaitement conscients des difficultés rencontrées par l’ancien organisme AGESSA et rappellent que plusieurs mesures ont déjà été prises depuis la mise en place de la nouvelle Sécurité sociale des artistes auteurs (2S2A) : Les missions confiées à la 2S2A ont été modifiées notamment avec le transfert du recouvrement des cotisations des artistes auteurs à l’Urssaf Limousin. Les nouvelles missions de la 2S2A ont donc été définies pour accompagner et assurerl’accès aux prestations pour les artistes auteurs. Ont ainsi été mis en place les liens avec l’assurance maladie afin de faciliter l’accès aux indemnités journalières pour les artistes auteurs. De même, l’action sociale est désormais pilotée par une commission composée de représentants des organisations professionnelles d’artistes auteurs – commission dont les travaux ont repris. En 2024, la mise en place d’un nouveau conseil d’administration et un changement de direction générale ont été actés, alors qu’il n’y avait plus de conseil d’administration et donc plus de représentation des artistes auteurs depuis plusieurs années. Les artistes auteurs ont donc jusque-là été privés de pouvoir assurer le suivi et le pilotage de leur protection sociale. Cette liste non exhaustive n’est que le début d’un travail à long terme qui doit permettre aux auteurs et autrices de garder la maîtrise de la structure au bénéfice de leurs pairs. Nous sommes en effet un certain nombre d’administrateurs et d’organisations professionnelles d’artistes auteurs à défendre la nécessité de maintenir la 2S2A nouvellement mise en place car il s’agit du seul organisme, existant aujourd’hui, au sein duquel peuvent se réunir l’ensemble des organisations professionnelles et représentants des artistes-auteurs sur les sujets sociaux.L’objectif est de faciliter les remontées d’information et l’identification des problématiques auxquelles sont confrontés les artistes-auteurs. Cette représentation nous permet notamment d’assurer le pilotage du régime social des auteurs, de ses spécificités, en s’assurant également d’un accès effectif et équitable à leurs droits sociaux. Il est important de maintenir cet organisme qui, tout en travaillant en lien avec l’Urssaf, la CNAV, la CNAM et autres organismes de sécurité sociale, doit demeurer indépendant, afin que les spécificités des artistes auteurs, ne soient pas noyées au milieu de celles des salariés du privé relevant du même régime général de la sécurité sociale. Les chantiers sont immenses et le CA s’est fixé une feuille de route ambitieuse, au bénéfice et au service des auteurs, votée par la grande majorité des membres du Conseil en décembre. Les élus au CA souhaitent pouvoir exercer leur mandat sereinement et avancer dans l’intérêt des Artistes-Auteurs, qui est au cœur de nos préoccupations et de notre action. Liste des signataires : EAT (Les écrivaines et écrivains associés du théâtre) GARRD (Guilde des Auteurs Réalisateurs de Reportages et Documentaires) Guilde française des Scénaristes SCA (Scénaristes de cinéma associés) SGDL (Société des Gens de Lettres) SNAC (Syndicat national des auteurs et des compositeurs) UNAC (Union nationale des auteurs et compositeurs) UPP (Union des photographes professionnels) Diffuseurs : CSDEM (Chambre Syndicale de l’Education Musicale) SNE (Syndicat national de l’édition) Personnalités Qualifiées du CA : Angela Alves et Jacques Fansten

Unis, auteurs et éditeurs assignent Meta pour imposer le respect du droit d’auteur aux développeurs d’outils d’intelligence artificielle générative

Actualités Unis, auteurs et éditeurs assignent Meta pour imposer le respect du droit d’auteur aux développeurs d’outils d’intelligence artificielle générative Le Syndicat national de l’édition (SNE), la Société des Gens de Lettres (SGDL) et le Syndicat national des auteurs et des compositeurs (SNAC) agissent en justice contre Meta devant la 3e chambre du Tribunal judiciaire de Paris en raison d’une utilisation massive d’œuvres sous droits, sans autorisation de leurs auteurs et éditeurs, afin d’entraîner son modèle d’intelligence artificielle générative. « Alors que nous avons constaté la présence de nombreuses œuvres éditées par des membres du Syndicat national de l’édition dans les corpus de données utilisés par Meta, nous saisissons aujourd’hui le juge pour faire reconnaître le non-respect du droit d’auteur, le parasitisme. Nous souhaitons, à travers cette assignation, agir sur le fondement des principes fondamentaux. La création d’un marché de l’IA ne peut pas se concevoir au détriment du secteur de la culture », déclare Vincent Montagne, président du SNE. Cette action en justice s’inscrit dans un contexte de régulation au niveau européen, l’AI Act ayant rappelé la nécessité pour les sociétés éditrices de solutions d’intelligence artificielle générative de respecter le droit d’auteur et d’assurer la transparence sur les sources utilisées pour développer des modèles de fondation. A l’occasion du Sommet pour l’action sur l’Intelligence Artificielle, 38 organisations internationales représentant l’ensemble des secteurs créatifs et culturels ont également publié une charte culture et innovation afin de défendre le droit d’auteur et la propriété intellectuelle face aux IA. « L’action que nous entamons doit aussi faire naître une volonté sérieuse des IA de tenir compte de la création, d’en respecter le cadre juridique et le cas échéant de trouver des contreparties pour l’utilisation d’œuvres dont ils se nourrissent. C’est essentiel pour préserver un écosystème fragile qui doit sa richesse à la diversité éditoriale », ajoute Christophe Hardy, président de la SGDL. François Peyrony, président du SNAC indique enfin : « L’objectif, à travers cette action inédite en France, est aussi d’ouvrir la voie à d’autres actions similaires afin de protéger si nécessaire les auteurs des dangers de l’IA qui pille leurs œuvres et le patrimoine culturel pour s’entraîner et qui produit des “faux livres” qui entrent en concurrence avec les vrais livres d’auteurs. » Les plaignants réclament le respect du droit d’auteur et, notamment, le retrait complet des répertoires de données créés sans autorisation et utilisés pour entraîner les IA. Contacts presse SNE : Hélène Conand, directrice de la communication, hconand@sne.frSGDL : Virginie Frenay, responsable communication, communication@sgdl.orgSNAC : Maïa Bensimon, déléguée générale, ladirection@snac.fr  

Projet de loi de finances 2025 : Abaissement du seuil de franchise en base de TVA

Actualités Projet de loi finances 2025 : Abaissement du seuil de franchise en base de TVA Le Syndicat national des auteurs et des compositeurs (SNAC) alerte ses membres sur la réforme particulièrement préoccupante, introduite par le projet de loi de finances 2025, et adoptée par le gouvernement via l’article 49.3 de la Constitution le lundi 3 février 2025. Cette mesure prévoit l’abaissement du seuil de franchise en base de TVA à 25 000 euros et impose un régime unique, supprimant toute distinction entre les différentes professions.   Jusqu’à présent, les auteurs/autrices et les compositeurs/compositrices disposaient d’une exception avantageuse et dérogatoire au régime commun des micro-entrepreneurs, avec un seuil de franchise en TVA plus élevé que celui des autres professions (47 700 euros en 2024 pour les auteurs/autrices et les compositeurs/compositrices). Cette distinction permettait de mieux prendre en compte les réalités économiques de ces derniers. L’uniformisation des seuils de franchise en base de TVA à 25 000 euros aura des conséquences significatives et alarmantes pour les auteurs/autrices et les compositeurs/compositrices, en contraignant nombre d’entre vous à facturer la TVA sur vos prestations. Le SNAC s’oppose fermement à cette réforme et demande au gouvernement de rétablir un régime spécifique pour les auteurs/autrices et les compositeurs/compositrices. Nous appelons nos adhérents et adhérentes à se mobiliser afin de défendre la particularité du secteur, et préserver la diversité culturelle. Contact : Maïa Bensimon – ladirection@snac.fr – 01 48 74 96 30

L’Académie de la Musique africaine – Un entretien avec Wally Badarou

Actualités L’Académie de la Musique africaine – Un entretien avec Wally Badarou Bulletin des Auteurs – Vous présidez l’Académie de la Musique africaine. Wally Badarou – En 2014, le directeur de la Sacem m’a interrogé sur la possibilité d’une action de la Sacem en Afrique. Compte tenu du passé compliqué de la France avec l’Afrique, je lui ai recommandé que la Sacem agisse en concertation avec les milieux de la musique africaine. Je lui ai proposé de créer une interface entre le monde de la gestion collective française et européenne et les milieux de la musique africaine. L’idée s’est élargie, dans la perspective de regrouper non seulement les auteurs-compositeurs mais toute l’industrie de la musique africaine au sein de l’Académie de la Musique africaine, qui serait l’équivalent de Tous pour la musique pour la France, « Musique » s’entendant au sens de « Musiques plurielles » bien évidemment, et qui comprendrait, au-delà de l’Afrique francophone, l’ensemble du continent africain, ainsi que les diasporas. Les diasporas historiques, c’est-à-dire celles issues de l’esclavage et de la déportation des Africains vers le Nouveau Monde, Amériques du Nord et latine, et les diasporas contemporaines, celles des Africains qui vivent à l’étranger. C’est un très vaste et ambitieux projet, qui a mûri durant une dizaine d’années dans le cadre d’une association loi 1901 créée en France, avec le soutien d’une trentaine de personnalités, telles que Papa Wemba, Youssou n’Dour, Manu Dibango. Il existe déjà sur le sol africain des structures, avec lesquelles il n’est pas question d’entrer en concurrence. Notre rôle est de valoriser et de fédérer ce qui existe et de créer là où rien n’existe. L’Académie se veut une entité de prestige, à laquelle l’existant désirerait appartenir. Elle s’appuie sur les organisations professionnelles nationales déjà opérationnelles, qui réunissent, dans plusieurs des 54 pays qui constituent l’Afrique, musiciens, compositeurs, producteurs, managers, luthiers, etc., et participent de l’industrie musicale africaine. Nous établissons un contact avec chacune. Notre première action a été de lancer des prix de l’Académie, à destination des candidats nominés par les associations locales et nationales, prix qui fonctionnent par collèges : par exemple les auteurs-compositeurs nominés au niveau national choisissent entre eux des auteurs-compositeurs de chacune des cinq régions qui composent l’Afrique : Afrique du Nord, Afrique de l’Est, Afrique de l’Ouest, Afrique centrale, Afrique australe. Auxquelles s’ajoutent deux autres régions : Diaspora Amérique latine et Diaspora Caraïbes. Tous les représentants de chaque région élisent, à un troisième niveau, un représentant par catégorie. Notre premier palmarès a été dévoilé cette année. Le tout se passe en ligne, grâce aux avancées technologiques, qui ont bénéficié de la nécessité de s’adapter à la Covid. De grandes actions sont désormais possibles sans avoir à se déplacer, ce qui représente un gain précieux à l’échelle d’un continent comme l’Afrique. L’Académie fait appel aux universitaires, historiens, musicologues, pour constituer des bases de données, participer à des colloques, faire vivre cette histoire de la musique africaine, qui n’arrête pas d’influer sur la musique du monde entier. La déportation de la musique africaine vers le Nouveau Monde a donné naissance aux musiques actuelles, comme le gospel, le rap, le jazz, le rock’n roll, la samba, la salsa, le reggae, etc., qui agitent le monde entier. L’ADN rythmique de la musique du monde est africaine. C’est une conversation permanente entre l’Afrique et le monde entier, par le truchement du Nouveau Monde. B. A. – Comment la Sacem s’incrit-elle dans cette dynamique ? W. B. – L’Académie travaille main dans la main, au niveau des actions pédagogiques et des financements, avec l’ensemble des institutions, comme l’Europe ou l’Unesco, avec tous les organismes de gestion collective, la Sacem, la « Gema » allemande, La « PRS for Music » au Royaume-Uni, avec les grands écoles américaines comme « Berklee College of Music ». L’Afrique est le cœur de ce projet global. C’est une manière de rendre toute sa fierté au monde de la création africaine, et un enjeu d’immigration puisqu’il s’agit de faire comprendre qu’en Afrique les ressources existent, ainsi qu’uneformidable créativité. L’Afrique peut d’être fière de ce qu’elle accomplit sur place. On n’a pas idée de ce qu’il se passe en Afrique à l’heure actuelle. B. A. – L’Académie a le projet d’adhérer au Snac. W. B. – Être membre du Snac permet de bénéficier éventuellement de ses conseils juridiques. Si l’Académie devient membre du Snac, les membres de l’Académie pourront bénéficier de ces conseils. Vu le nombre des artistes africains francophones ayant contrat avec l’un de nos éditeurs en France, une telle opportunité sera précieuse. Ce sera une manière d’attirer des adhérents à l’Académie, et de faire rayonner le nom du Snac. Le principe a été validé par le conseil d’administration de l’Académie. Nous parlons maintenant des modalités avec le conseil syndical du Snac. Photographie de Wally Badarou. Crédit : Geneviève Badarou. Cet entretien a été publié dans le « Bulletin des Auteurs » n° 159, en octobre 2024.

Financer sa formation professionnelle – Un entretien avec Laurence Salva

Actualités Financer sa formation professionnelle – Un entretien avec Laurence Salva Le droit au financement de sa formation professionnelle par des dispositifs légaux est assez jeune pour les artistes auteurs. Comme d’habitude en matière de droits sociaux, nous sommes toujours les oublié.e.s. On finit toujours par nous accorder les mêmes droits sociaux que les autres travailleurs, mais après tout le monde. La formation professionnelle en est le meilleur exemple. On obtient souvent ces droits de haute lutte, et parce que des individus et/ ou des organisations professionnelles d’artistes auteurs se sont battus, souvent pendant des années, pour qu’on les ait. La création de la contribution « Formation professionnelle », que nous avons sur nos notes de droits d’auteur, qui se monte à 0,35 % brut hors taxes sur nos droits, date de dix ans seulement. En novembre 2023, l’Afdas (« Assurance Formation des Activités du Spectacle ») a organisé une grande célébration pour fêter ces dix ans. Durant cet événement, une table ronde a expliqué la genèse de ce droit. La formation des artistes auteurs est ma passion. Je suis membre de la commission « Cinéma et Audiovisuel » des artistes auteurs à l’Afdas depuis 2018, et je la préside depuis 2020. J’ai été membre de la commission « Formation des sociétaires Sacem » de 2017 à juin 2024. L’Upad (« Union professionnelle des auteurs de doublage ») n’existait pas encore quand des organisations professionnelles, dont le Snac avec Emmanuel de Rengervé en première ligne, ont commencé à se battre pour obtenir ce droit. J’ai été passionnée d’apprendre, durant la célébration de novembre 2023, comment cela s’était passé. Une fois la fête terminée, j’ai décidé d’en savoir plus. J’ai contacté et interrogé la majorité des interlocuteurs présents ce soir-là et effectué d’autres recherches. Vous pouvez lire le résultat sur le blog de l’Upad. Le CPF (« Compte personnel de formation »), quant à lui, n’a été ouvert aux artistes-auteurs qu’avec la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. C’est également très récent. Laurence Salva Bulletin des Auteurs – Les auteurs sont-ils suffisamment informés de leur droit au financement de leur formation professionnelle ? Laurence Salva – Les auteurs ne savent pas qu’ils peuvent recourir à un financement d’une formation professionnelle. Ils se disent qu’ils n’ont pas le temps ou qu’il n’y a pas de formation qui leur correspond. Ils ne connaissent pas tous les choix qui leur sont ouverts. Il y a un manque d’information qui est vraiment regrettable. B. A. – Quels sont les différents dispositifs légaux pour qu’un auteur puisse financer sa formation professionnelle ? L. S. – De manière générale, il en existe deux : l’Afdas et le CPF, qui sont totalement autonomes et indépendants. L’Afdas est l’« Opco » (OPérateur de COmpétences) des secteurs de la culture, des industries créatives, des médias, etc. Les membres du Snac dépendent de trois commissions de cette Opco : « Cinéma et Audiovisuel » ; « Musique et Chorégraphie » ; « Écrit et Arts dramatiques ». Quel est le circuit des cotisations de formation ? Nous payons depuis dix ans des contributions « Formation professionnelle » sur nos droits d’auteur, à hauteur de 0,35 %. Les diffuseurs cotisent à hauteur de 0,1 %. Ces contributions sont collectées par l’Urssaf, qui les transfère à « France compétences », qui distribue ces sommes d’argent à plusieurs opérateurs : une petite partie à la Caisse des Dépôts et Consignations afin de financer le CPF, une autre fléchée vers le CEP (Conseil en évolution professionnelle) et une dernière partie (la grosse majorité) à l’Afdas. Contrairement aux salariés pour lesquels les cotisations sont mutualisées, celles des artistes auteurs sont dès le départ mises à part, et elles contribuent à abonder le « Fonds deFormation des Artistes Auteurs » à l’Afdas. Ce fonds de formation dispose d’un budget d’un peu moins de dix millions d’euros. S’y ajoute la contribution volontaire des « OGC » (« Organisations en gestion collective »), lesquelles siègent au Conseil de gestion de ce Fonds. Le Fonds de Formation est hébergé à l’Afdas. Il est géré par le Conseil de Gestion, composé de représentants de diffuseurs (7 sièges), des « OGC » (5 sièges), et d’organisations professionnelles d’auteurs (21 sièges), tous nommés par le ministère de la Culture. B. A. – Tous les auteurs sont-ils éligibles aux formations dispensées par l’Afdas ? L. S. – Il existe un seuil, qui prend en compte soit les trois dernières années, hors année en cours, des droits d’auteurs cumulés d’un montant minimum de 6 990 euros (pour 2024), ce qui correspond à 600 fois le Smic horaire brut, soit les cinq dernières années, hors année en cours, des droits d’auteurs cumulés d’un montant minimum de 10 485 euros (pour 2024), ce qui correspond à 900 fois le Smic horaire brut. Si vous êtes éligible, vous avez un droit à formation à hauteur de 5 600 euros par an(en 2024) dans la limite des budgets disponibles. Entre 3 000 et 4 000 auteurs se forment chaque année avec l’Afdas. Pour demander une formation, il faut vous y prendre à l’avance, quatre semaines avant la réunion de la commission concernée. Si vousn’utilisez pas ces 5 600 euros en 2024, ou si vous n’avez utilisé cette somme qu’en partie, cette somme ou son reliquat ne peut se cumuler avec la somme à laquelle vous pourrez avoir droit pour vous former en 2025. Les sommes non utilisées vont abonder les recettes du Fonds de l’année suivante. B. A. – Quelles sont les formations ouvertes aux auteurs à l’Afdas ? L. S. – Ce sont forcément des formations utiles ou nécessaires à votre métier.Pour trouver une formation, soit vous choisissez une formation référencée dansle catalogue proposé sur le site de l’Afdas, qui présente des formations choisies et validées par les représentants des commissions. Ces formations ont remporté un appel d’offres, dans le cadre d’un marché public. Elles sont alors prises en charge à 100 %. Votre demande n’a pas besoin de passer en commission. Soit vous cherchez vous-même une formation (via des moteurs de recherche ou auprès de collègues qui peuvent vous en recommander certaines, etc.). Dans ce cas-là, selon le type de la formation (cf voir plus loin), votre demande peut être acceptée directement par les services de l’Afdas ou avoir à passer devant une commission qui la validera ou qui la refusera. Quels sont les types de formation ? – les formations transversales (utiles à tous les

Point sur la régularisation des cotisations arriérées (RCA)

Actualités Point sur la régularisation des cotisations arriérées (RCA) : dispositif de rachat des cotisations sur les droits d’auteur Extrait d’une présentation de la Scam par Pascale Fabre sur le sujet : « Avant 2019, les cotisations d’assurance vieillesse plafonnées n’étaient pas appelées par l’Agessa sur les droits d’auteurs des artistes auteurs assujettis. Une démarche spécifique d’affiliation était nécessaire. Seules les cotisations non contributives, telle que la CSG/CRDS, étaient précomptées ou appelées. Depuis 2019, les cotisations d’assurance vieillesse plafonnées sont précomptées par les organismes français versant des droits d’auteur (la Scam, les producteurs, les éditeurs…) et alimentent les droits à la retraite dès le premier euro de droit d’auteur. Cela concerne uniquement la retraite de base (l’assurance retraite). La régularisation des cotisations arriérées de retraite présente certains avantages : Permet de régulariser des périodes non cotisées sur les droits d’auteur pour améliorer la durée de cotisation (trimestres manquants) et, le cas échéant, le montant de la retraite (prise en compte des droits d’auteur perçus dans les 25 meilleures années) ; Est plus avantageux que le rachat de trimestres et de cotisations des salariés ; Obtenir une aide financière exceptionnelle de certains organismes de gestion collective (notamment la Scam sur critères sociaux) et de la Sécurité sociale des artistes auteurs (SSAA).   Les artistes auteurs concernés sont ceux pour qui la cotisation d’assurance vieillesse n’a pas été appelée par le passé par l’Agessa, ou ceux relevant aujourd’hui de la Sécurité sociale des artistes auteurs dont l’affiliation à l’Agessa/MDA avait été refusée. Concernant les artistes auteurs retraités, la régularisation est possible, même si la pension a été liquidée (attention la régularisation n’est pas rétroactive à la date de liquidation de la pension mais à date de la régularisation des cotisations arriérées). La demande de régularisation se fait auprès de l’assurance retraite (Cnav). Avant de se lancer, il faut examiner attentivement son relevé de carrière afin de corriger les erreurs éventuelles, de repérer les périodes les plus intéressantes à régulariser et éventuellement de simuler le coût de la régularisation. Un dossier complet devra ensuite être envoyé à l’adresse postale unique de la CNAV par lettre suivie : CNAV Assurance retraite d’Ile-de-FranceCS 7000993166 Noisy le Grand cedex. Les pièces justificatives à produire sont un relevé intégral des droits d’auteur établi par les OGC, les producteurs, les éditeurs ou des documents authentifiés indiquant le revenu brut hors taxe perçu par année. A défaut, il faudra produire : un avis d’imposition sur le revenu par année concernée par la régularisation et les pièces justificatives prouvant la réalité du versement des revenus (redditions des comptes, contrats  et preuve du versement, certificat de précompte, relevés de carrière de l’Ircec). » Les délais de traitement par la CNAV peuvent être très longs, nous conseillons aux auteurs et autrices de s’y prendre bien en amont de leur départ à la retraite. C’est un investissement en temps et argent qui peut être fastidieux et décourageant. Mais les auteurs et autrices que nous avons accompagné.es et qui ont validé un devis de la CNAV sont globalement très soulagé.es de l’avoir fait et de sécuriser ainsi leur future retraite » Photo de Pascale Fabre. Crédit : Scam Cet article a été publié dans le « Bulletin des Auteurs » n° 159, en octobre 2024.

L’IA abîme l’image de notre métier – Un entretien avec un traducteur audiovisuel

Actualités L’IA abîme l’image de notre métier – Un entretien avec un traducteur audiovisuel Bulletin des Auteurs – L’IA menace-t-elle votre métier ? Un traducteur audiovisuel – La banque d’affaires Goldman Sachs a publié un rapport voici quelques mois sur l’IA, où il est démontré que l’IA est une bulle qui va éclater parce qu’il n’y a pas d’argent à gagner. Pour moi, l’IA c’est un peu comme les fansubbers, dont tout le monde parlait il y a dix ou quinze ans, les bénévoles qui écrivaient les sous-titres gratuitement pour traduire des œuvres piratées. Ces fansubbers ne présentaient pas une menace réelle pour les auteur.e.s professionnel.le.s de sous-titres, car ils n’avaient aucune compétence en traduction. Mais ils présentaient une menace en termes d’image, en instillant l’idée que n’importe qui peut créer des sous-titres, ce qui tendait à dévaloriser notre métier. Là, c’est pareil : dès que l’on dit : « J’écris des sous-titres », on s’entend répondre : « Ah oui ! Eh bien ce sera bientôt fait par les ordinateurs. » Les gens répètent ce qu’ils ont entendu, mais qui est complètement faux. Les systèmes de traduction automatique en sous-titrage produisent de la bouillie. En effet, ils ne font pas de la traduction, mais de la corrélation statistique. La traduction, c’est transmettre le sens. Or une machine ne comprend pas le sens, elle ne comprend rien, elle décide seulement qu’après ce mot-ci il y a de fortes chances que vienne ce mot-là. Par l’augmentation de leur puissance, les machines sont désormais capables d’établir des corrélations au sein d’immenses champs de données. Malgré tout, un humain doit passer derrière, c’est le Turc mécanique qui joue aux échecs : il y a un humain, caché dans la machine, qui actionne la main de l’automate. Mais aujourd’hui, les sociétés qui produisent les processeurs chutent en bourse parce que les scientifiques commencent à expliquer que ces méthodes de corrélation statistique ont des limites, intrinsèques, renforcées par le fait qu’elles produisent de mauvaises traductions, dont ensuite elles s’alimentent. Les algorithmes s’enfoncent ainsi dans l’erreur. À ce titre, les fameuses « démonstrations » des performances de l’IA, qu’on trouve sur les sites des vendeurs d’IA, sont trompeuses, l’humain est repassé derrière, et personne ne sait combien de temps a été passé à corriger la machine. L’enjeu est uniquement de faire du business, il s’agit de créer le buzz et d’impressionner, pour vendre. B. A. – Les sociétés avec lesquelles vous travaillez ne commencent-elles pas à vous imposer un travail de « post-édition » ? T. A. – Certains sous-titres que l’on voit sur des plateformes ont été produits par une machine et un humain est repassé rapidement derrière. Le résultat est très mauvais. Le plus grave, c’est que des universités, des master pro, se mettent à dire à leurs étudiants : « C’est merveilleux, on va vous former pour l’avenir, vous serez post-éditeurs. » Cela donne une idée du niveau de sérieux de ces formations universitaires. Pour beaucoup d’universités, ce qu’il faut, c’est être à la pointe de ce qui semble être la modernité pour donner l’idée à la hiérarchie qu’on est de son temps et attirer les étudiants. Cela ne les dérange pas de former des Bac + 5 qui ne seront que des perroquets. B. A. – C’est un modèle qui pourrait alors s’imposer. T. A. – Peut-être, mais il ne s’imposerait pas parce qu’il est efficace, ou performant, ou même pertinent économiquement parlant, car l’économie de coût qu’il pourrait permettre équivaut inévitablement à un sous-titrage au rabais. Je ne sais même pas si cela revient vraiment moins cher, et on se retrouve avec un produit inutilisable. Posons donc la vraie question : quand on dépense de l’argent, a-t-on envie d’obtenir un bon sous-titrage, ou un mauvais sous-titrage ? Le problème n’est donc pas que l’on a inventé des machines merveilleuses qui vont remplacer les gens. Le problème, c’est que les vendeurs d’IA commercialisent du vent, du vaporware, mais risquent de réussir à convaincre une part du public que la traduction c’est fini, au profit de la traduction automatique et d’une post-édition. B. A. – Les entreprises avec lesquelles vous travaillez font-elles pression pour que vous adoptiez ce système ? T. A. – Pas les sociétés basées en France. Pour certaines plateformes, c’est autre chose, dans la mesure où elles ont des prestataires globaux auxquels elles ont donné tout pouvoir et dont elles contrôlent très mal les méthodes. La corrélation statistique à grande échelle peut être efficace dans certains domaines, dans les sciences dures, en chimie, en physique, pour faire des simulations de matériaux, c’est très utile. Ces applications permettent d’économiser un temps énorme et sont donc efficientes, mais dans un champ extrêmement réduit et précis. Mais entraîner l’IA à accomplir une tâche, même dans un champ limité, est d’un coût très élevé, consomme des quantités d’électricité invraisemblables, et c’est pour cela que Goldman Sachs souligne qu’entre ce qu’on peut vendre avec l’IA et le coût de développement, il n’y a aucune logique économique. Bien sûr que l’IA est inquiétante, mais avant tout parce qu’elle dévalorise nos métiers. Il faut se méfier des gens qui ont un intérêt économique à vous raconter des sornettes. Or ce sont les seuls à faire la promotion de l’IA en traduction.