Radio pas éphémère

Actualités Radio pas éphémère, par Simone Douek Fini le regret d’avoir raté l’émission qui aurait changé nos vies. La radio n’est plus éphémère. Le casque sur les oreilles on navigue dans tout ce qu’on aurait voulu écouter mais qu’on n’avait pas eu l’occasion de saisir. On ne saisit plus, on choisit. On pioche dans une foule de créations offertes à nous. On écoute, on butine. On engrange aussi – attention au syndrome de l’accumulation qui, vertige multipliant à l’envi le temps de l’écoute, nous promettant de belles réserves pour nos moments perdus, pourrait atteindre un seuil dépassant largement le temps de notre vie… On se fait donc un coussin bien rempli et bien moelleux de sons et de voix. On se cale sur un canapé ou dans son lit à moins que ce ne soit sur la plage face à la mer ou au sommet d’une montagne. L’ère des podcasts a radicalement changé le temps radiophonique, créant un éternel présent de l’écoute. Et on a fait prisonnières des millions d’écritures – d’écritures sonores s’entend. Qu’est-ce qu’une écriture de podcast ? Qu’a-t-elle de particulier par rapport à l’écriture radiophonique ? Dans les deux cas, il s’agit d’une création sonore élaborée, mais les conditions de leur fabrication diffèrent. Les outils d’écriture, eux, très facilement accessibles aujourd’hui, multipliant les opportunités de création, sont les mêmes : on enregistre, on monte, on mixe. Et derrière ces trois mots un peu lapidaires se cachent mille sollicitations à la captation du monde. Sait-on qu’un micro-événement du banal peut devenir objet d’attention ; imagine-t-on la subtilité de saisir le grain d’une voix ; comprend-on la délicatesse d’un preneur de son qui silencieusement se glisse dans un environnement pour en traduire le caractère avec ses micros ? Mesure-t-on – écriture sonore par excellence – les pouvoirs du montage, les possibilités « d’entendre » comme on le souhaite, à l’avance, ce que l’on veut offrir par le mixage à l’oreille des autres ? Production de podcast et production radiophonique connaissent les mêmes vertiges. D’un documentaire de création on attend qu’il transforme le réel par le son. Le podcast n’est pas toujours l’équivalent d’un documentaire de création. Il s’assigne un rôle d’exploration de la société qui passe par différentes expressions, allant du simple entretien à la fiction, en passant par l’enquête journalistique et le documentaire ; ce faisant, il se réduit trop souvent au rôle de transmettre de l’information, sans pouvoir faire de cette exploration un objet esthétique. Il arrive que certaines productions soient décevantes, et ce ne sont pas forcément les auteurs qui en sont la cause, mais plutôt les conditions dans lesquelles ils doivent travailler : car certains diffuseurs ou producteurs de podcasts ont tendance à reproduire un formatage de contenus et de formes pour rendre attractives leurs productions. Dans sa forme, le podcast se décline souvent en séries (elles existent bien sûr à la radio, séries documentaires ou feuilletons, mais à une moindre échelle de présence dans une grille de programme), ce qui est peut-être une particularité. Or on attendrait plutôt du podcast qu’il utilise et magnifie l’écriture sonore. Avec le podcast, on rêverait de pouvoir s’immerger en permanence dans des univers sonores qui soient travaillés, comme le sont les plus belles compositions sonores, objets esthétiques qui aient leur expression, leur poésie, leur appel à l’imaginaire. Alors on pourrait dire qu’il n’y a pas de différence avec l’objet radiophonique, et que seul le mode de diffusion de l’objet sonore les démarque l’un de l’autre. Ce dernier détail – lourd de conséquences – est d’importance. Ce qui les différencie, c’est la diffusion, le moyen d’écoute : pour le podcast, la mise en ligne est initiale, alors qu’elle ne l’est pas pour la radio. Il y a donc deux sortes de podcasts : ceux qui « rattrapent » le rendez-vous manqué avec une émission de radio, et ceux que l’on appelle les podcasts « natifs », créés pour être diffusés sur le net, étrangers aux ondes hertziennes. Les premiers sont immédiatement réécoutables sur le site de la chaîne de radio, soit en streaming soit en objets téléchargeables. Les seconds peuvent émaner des chaînes de radio, mais aussi d’associations, collectifs, structures produisant les différents podcasts qui sont ensuite diffusés sur les plates-formes d’écoute. Le podcast natif, qu’il soit produit par une radio ou par un producteur indépendant, est immédiatement mis en ligne et ne passe pas par la diffusion hertzienne. Ce mode de diffusion est lui-même le signe et l’origine d’un autre problème : car la question essentielle aujourd’hui porte sur l’économie de ce genre sonore si plébiscité, mis en avant, considéré comme le summum de l’avant-garde et comme prometteur de talents. Mais de quoi vivent – ou peuvent prétendre vivre – les auteurs de podcasts ? Il faut s’arrêter sur la rémunération des podcasts, et là encore la différence se fait sentir. Pour qu’une émission de radio naisse, il lui faut un financement premier : or ce financement existe dans la mesure où un projet accepté par une chaîne de radio (essentiellement de la radio publique) est immédiatement pris en charge pour sa fabrication par celle-ci qui fournit les moyens techniques, et qu’il génère pour l’auteur un cachet correspondant à sa prestation artistique et technique. Cela est aussi le cas à Radio France pour un podcast natif. Mais comment les podcasts nés dans d’autres studios de production permettent-ils aux auteurs de trouver un soutien à la création ? Dans la plupart des cas rien ne leur permet de pouvoir vivre – un peu – pendant le temps de la création sur l’équivalent d’un à-valoir en littérature. Il faut se tourner aujourd’hui vers les bourses ou les aides, avoir la chance de voir son dossier sélectionné, tant sont nombreuses les demandes – ce qui montre l’ampleur de l’attrait et de la passion pour le son. La Scam est très attentive à la création des podcasts et très désireuse de la soutenir – témoin son association au « Paris podcast festival » et le questionnement qu’elle y a mené le 11 octobre dernier, sur le statut de l’œuvre sonore, les aides pour la création et pour la production, la régulation pour les plates-formes. Elle ouvre sa bourse « Brouillon d’un rêve », dont les fonds proviennent de la copie
Webinaire mardi 16 novembre à 18h : Quand il y a des dérives comportementales…

Actualités Webinaire mardi 16 novembre à 18h : Quand il y a des dérives comportementales… Quand il y a des dérives comportementales dans la relation auteur /éditeur. Un premier webinaire avec Muriel Trichet et Pierre Nocérino, animé par Christelle Pécout pour confronter les perspectives psycho-sociale et sociologique de l’étude. Vous pouvez vous inscrire en envoyant un mail à contact@snac.fr – Vous recevrez par retour le lien de connexion nécessaire à cette réunion. Quelques informations sur l’étude Quand il y a des dérives comportementales dans la relation auteur /éditeur : l’objectif n’est pas de faire une étude de plus, mais d’avoir un outil pour s’engager plus avant dans une réflexion globale sur les impacts des conditions de travail sur la santé, dans les phases de création et d’exploitation des œuvres. il s’agit de réfléchir ensemble et de proposer des pistes de réflexion pour améliorer une relation auteur ou autrice / éditeur ou éditrice qui entraîne parfois une « souffrance professionnelle » dans le cadre particulier de l’édition d’une œuvre. le travail préparatoire s’est fait avec des experts indépendants d’horizons différents : notes techniques, recueil de données anonymisées et confidentielles, organisation de webinaires… Il faut maintenant trouver les critères d’entrée permettant la prescription d’actions de prévention dédiées et la rédaction d’une charte des bons usages dans la relation auteur / éditeur. Il faut instaurer le dialogue avec les pouvoirs publics et les maisons d’édition pour repenser ensemble la relation auteur, autrice / éditeur, éditrice.
[AG 2016] Rapport moral de la présidente Simone Douek

Actualités [AG 2016] Rapport moral de la présidente Simone Douek Bonjour à toutes et à tous, Je déclare ouverte la 69ème assemblée générale du Snac… Cette année, comme les précédentes, nous n’avons pas manqué d’énergie pour continuer de défendre le droit d’auteur dans un contexte qui ne lui est pas particulièrement souriant, au milieu de mutations qui demandent réflexion et adaptation. Le principal constat de l’époque, ça n’aura échappé à personne, est que nous nous dématérialisons à la vitesse V. Le virtuel nous gagne, ses simultanéités de diffusion et de réception, et cette dévoration goulue de l’univers tout entier dans une absence permanente de hors-champ ; et surtout – toujours – cette exigence de gratuité du public pour tout ce qui circule sur la toile. Le partage des valeurs demeure problématique, les auteurs restent les moins bien servis dans ces diffusions de masse. Ce qui fait que notre travail en est d’autant démultiplié, accéléré, densifié. Et que la raison d’être du Snac, bien loin de s’user ou de s’amenuiser, accroît son assise. Nous devons répondre tous azimuts aux projets de lois – qu’ils soient intérieurs à notre territoire ou d’envergure européenne qui tentent de détruire celle que nous défendons, et continuer d’assurer notre présence et notre rôle auprès des auteurs. Nous sommes présents dans tous les lieux où nous devons intervenir. Car la loi sur la propriété intellectuelle existe, à nous d’être vigilants pour en faire évoluer les interprétations, tout en la gardant pérenne. C’est vrai aussi que nous vivons dans un contexte où nous sommes moins soutenus : en ces années – et ce n’est pas nouveau les syndicats sont facilement discrédités. Ils s’entendent dire qu’ils ne sont plus adaptés à l’évolution du panorama social et économique. L’individualisme gagne du terrain. Et le Snac n’échappe pas à ce jugement sévère. Quand bien même on remplacerait le mot syndicat par «union», ou «guilde», ou «groupement», ou «organisation», ou «association professionnelle», ni les actions ni l’axe du travail ne changeraient : il s’agit bien, pour nous, de la défense du droit d’auteur et par conséquent de la vie de la création. La particularité de notre syndicat de réunir tant de métiers de créateurs différents est aussi une force – et non un émiettement, comme on l’entend dire : les ponts et les échanges entre nous ne peuvent qu’être enrichissants, c’est une école de négociation au sein même de notre organisation. Donc, comme chaque année nous nous sommes penchés sur un nombre important de dossiers, avec en toile de fond les travaux de la Commission européenne qui s’applique à « transformer » le droit d’auteur. Nous sommes en attente des nouveaux textes, après que nous avons donné il y a à peu près un an, notre « Point de vue des auteurs pour une évolution cohérente du droit d’auteur », qui mettait en garde contre une « sous-législation » européenne. Comme chaque année, les dossiers que nous avons étudiés ont concerné aussi bien les conditions matérielles de la vie des auteurs, que les projets de loi touchant au droit d’auteur. Nous avons suivi de très près le projet de loi LCAP (Liberté de création architecture et patrimoine) – et ce depuis le mois de janvier. Cette loi, qui a, entre autres projets, l’ambition de rétablir la transparence entre artistes-interprètes, producteurs et plates formes de musique en ligne, n’en oubliait pas moins les auteurs et les compositeurs, qui étaient au début les grands absents du texte. Au cours de notre audition auprès de la commission culturelle de l’Assemblée nationale, nous avons insisté sur ce point. Nous avons proposé divers amendements à ce projet de loi. L’amendement de Patrick Bloche s’en est inspiré pour ce qui est du domaine du livre, à propos de la transparence des éditeurs et des redditions de comptes aux auteurs. Mais cet amendement a connu des péripéties, vous le savez, il a été supprimé par le Sénat, repris à son retour à l’Assemblée nationale, mais bien écorné. Nous avons, au cours de notre audition auprès de la commission, insisté sur la nécessité de remettre au goût du jour numérique les contrats d’édition musicale, qui à ce jour restent obsolètes. Ce point aujourd’hui occupe et préoccupe grandement, car la mobilisation des compositeurs pour le contrat d’édition numérique se heurte à une négociation compliquée, ou plus exactement à une absence de négociation, et c’est là que se démontre une fois de plus la nécessité d’une volonté politique, volonté politique qui jusque là n’a pas existé. Le Snac a demandé que la mission Kancel-Maréchal qui devait étudier la question se transforme en instance de médiation, ce qui paraît accepté. Le code des usages qui en sortirait pourrait, de fait, faire évoluer la loi. Nous avons par ailleurs, cette année, défendu de plusieurs façons une certaine idée de la création, de l’auteur, de sa liberté. – La loi République numérique – qui est passée à coup de 49.3 elle aussi – est parfois contestable, lorsqu’elle demande par exemple la mise en ligne gratuite des travaux des chercheurs dont une partie du financement vient de l’État ; eux-mêmes interprètent cela comme un déni de la notion d’auteur ; et cela pose à nouveau la question de la définition du domaine public, que certains rêvent de transformer en règle de base par défaut de ce que j’appellerais un «non droit de la propriété intellectuelle ». – Dans le souci de défense de la langue et de la culture françaises, nous avons suivi de près la question des quotas de chansons françaises à la radio, en nous inquiétant de la pauvre diffusion de nouveautés par les radios. Un amendement du projet de loi LCAP – toujours elle – contribue à faire respecter ces quotas, et le Snac est co-signataire d’une tribune qui appelle la validation de ces amendements en séance publique. – Nous nous sommes manifestés pour que ne soit pas caricaturée l’image de l’auteur, de l’écrivain, qui n’est ni un pauvre hère ni un vendu, ni un pur esprit, comme semblait le suggérer Mazarine Pingeot