[AG 2024] Rapport moral de la présidente Bessora

Actualités [AG 2024] Rapport moral de la présidente Bessora A l’occasion de l’assemblée générale du SNAC qui a eu lieu le jeudi 23 juin 2024 dans les locaux du syndicat, la présidente Bessora a ouvert la séance par son rapport moral. Chers Auteurs, chers Compositeurs, chers collègues et amis, Bienvenue au SNAC, 80 rue Taitbout, où George Sand coucha avec Maupassant… non… Chopin, et réciproquement. Si sensuelle et prestigieuse soit notre adresse, parisienne qui plus est, le SNAC est un syndicat. Qui a reçu l’appel du 18 juin. Pas celui du général de Gaulle, celui du Comité Confédéral National de la CGT. Trois tracts… pardon, trois documents et six pages d’explications nous sont parvenus le 18 juin pour nous dire « Toutes les forces de la CGT doivent rentrer dans la bataille pour empêcher l’extrême-droite d’accéder au pouvoir. » Alors chers collègues et amis, c’est très simple : pour sauver le pays, le monde, l’univers connu et inconnu, une seule solution : voter le Nouveau Front Populaire. Telle est la consigne qui nous est donnée, camarades-patriotes. J’avoue que, au moment où je lis ces six pages… d’argumentaires, je ne saisis pas tout. Mais plus je lis, plus je comprends pourquoi je ne comprends pas : c’est parce que je suis une imbécile. Qui n’a pas « pris conscience du danger » Qui est dans la « méconnaissance », dans la « confusion », sous la « pression patronale ». Imbécile certifiée, je ne suis pas de la même espèce que les crétins qui votent Rassemblement national. Car j’appartiens à une autre race de débiles, les indépendantistes. Ceux qui, de la Nouvelle-Calédonie jusqu’à votre syndicat défendent l’indépendance, la liberté de création, d’expression, de vote ou de non-vote. Notre syndicat rassemble des auteurs et des compositeurs dont le commun est le droit d’auteur. Notre syndicat défend nos intérêts matériels et moraux, collectifs et individuels. Il n’est pas le véhicule de nos aspirations ou opinions personnelles, qui sont toutes très différentes. Il n’est pas notre paradis perdu. Il n’est pas notre œuvre, marquée par notre singularité, par l’empreinte de notre personnalité. Il est une personne morale distincte de nous. Nous l’animons, avec nos sensibilités, mais sa mission nous dépasse et elle est d’intérêt général… en tout cas collectif. Alors j’ai lu trois fois la prose de notre CGT et j’ai bondi quatre fois de ma chaise. « Il faut tout faire pour empêcher ce scénario catastrophe » « Il convient de prendre les dispositions pour que personne ne manque à l’appel » « Un trop grand nombre de nos syndicats sont absents des actions, et ne répondent pas aux sollicitations. C’est un véritable problème qui ne peut plus durer. » « Aucun ne doit rester en dehors de la bataille » Il faut, il faut, il faut. Nous devons, nous devons, nous devons. Nous voilà donc prévenus, les amis, ne venons pas nous plaindre si on nous casse la gueule après les élections, en tout cas la gueule de ceux qui ne feront pas ce qu’il faut, ne voteront pas ce qu’il faut, ou iront à la piscine plutôt qu’au bureau de vote. C’est normal de se faire défoncer quand on a tort. Regardez les Arabes et les PD, eux aussi ils se font démonter parce qu’ils n’ont pas raison ! Eh oui ! Et pourtant… Votre syndicat, transversal en métiers, et divers en opinions, a rédigé une Charte des Valeurs. C’était sous la présidence de Pierre-André Athané. Des gens très bien, qui se revendiqueraient volontiers de Léon Blum, nous avaient cassé la gueule par réseaux sociaux et médias interposés, parce que nous avions exercé notre liberté d’agir et de penser. Au sujet de l’Agessa par exemple. Ou parce que nous nous inquiétions de la discrimination professionnelle proposée par certaines organisations ou medias. Ou parce que le suffrage censitaire proposé dans le rapport Racine – autant dire les Table de la Lois, nous interrogeait. Ou parce que le revenu de remplacement nous questionne, d’autant qu’il serait, lui aussi, le privilège de certains au détriment de tous les autres. Ces cassages de gueule nous avaient inspiré, en mars 2021, un communiqué, intitulé Contrevérités et Tartufferie. Au prélable, en avril 2020, nous avions rédigé un rappel de nos fondamentaux, cette Charte des Valeurs que nous avons amendée il y a un an, en ces termes…. Profondément attaché à la liberté d’expression et de création, socle de notre démocratie et dont le cadre est défini par la loi, le syndicat entend soutenir toute créatrice et tout créateur contre toute personne ou tout groupe de pression, public ou privé, qui viserait à les censurer, à imposer des normes esthétiques, politiques ou morales, et à interdire tout débat. En d’autre termes, la religion ethnico-politico-etcetera des uns et des autres les regarde. Alors bien sûr, vous êtes peut-être assis à côté de quelqu’un qui ne pense pas comme vous. De quelqu’un qui ne vote pas comme vous. Ou même de quelqu’un qui se dit « Nan mais la CGT-là, Ils ont cru qu’ils étaient Killian Mbappé ou quoi ? » Ou alors votre voisin pense tout bas « Moi je m’en fous, detouet façon je vote Kimmy Schmidt. » Bref, vous êtes probablement assis à côté de quelqu’un qui n’est pas votre réplique. Alors on le sait depuis Jacques Chirac, la différence, ça pue. La différence, ce n’est pas juste le bruit et les odeurs, hein. La différence, c’est aussi la différence d’opinion. Bien sûr, on peut se pincer le nez pour lutter contre les mauvaises odeurs politiques de notre collègue et voisin, mais notre Charte des Valeurs a pris le parti de l’indépendance et du respect des libertés indivuelles. Cest un peu notre boussole. Et cette boussole s’affole devant les arguments d’autorité de la CGT, qui établissent, sans contestation possible, la vraie vérité, qui est que le SNAC serait une organisation politique sous-marin du Nouveau Front Populaire. Certains d’entre vous m’objecteront que notre boussole est probablement déréglée, c’est pour ça que je m’enfonce dans l’erreur. S’il vous plaît, ne me tondez pas à la libération, moi je n’ai jamais fricoté avec l’ennemi ! Pourtant c’est vrai, j’appartiens à la race débile des indépendantistes et dans cette race, je fais partie de la sous-espèces des auteurs, qui sont des débiles profonds. C’est pour ça