Autrices et Auteurs confronté.e.s à la crise sanitaire et économique

Actualités Autrices et Auteurs confronté.e.s à la crise sanitaire et économique TÉMOIGNAGES D’AUTRICES OU D’AUTEURS : Christelle Pécout / Nicole Masson / Bessora / Philippe Lebeau / Julia Borsatto /Laure-Hélène Césari / Héloïse Chouraki / Laurent Mantel / Ludmila Volf / Cécile Däniker / Olivier Cohen / Mariannick Bellot / Christophe Héral / Guénaël Louër / Hélène Pince / Dominique Lemaître / Richard Dubugnon / Henri Nafilyan Nous avons demandé en avril 2020 aux membres des différents groupements qui composent le Snac de témoigner, en un bref constat, des difficultés rencontrées dans l’exercice de leur profession d’autrice.teur du fait de la crise sanitaire et économique. Bande Dessinée / Lettres – Christelle Pécout, vice-présidente du Snac, membre du groupement Bande Dessinée / Lettres. Dans les jours qui ont suivi l’annonce du confinement, les annulations des différentes interventions que je devais faire ont suivi très rapidement. Une intervention en bibliothèque, une journée de dédicace chez un grand constructeur automobile, des ateliers dessin, et deux conférences dans un gros salon manga… Je fais partie de ces auteurs de bande dessinée pour qui le printemps, temps de festivals et d’événements autour du livre, est un moment de rencontres rémunérées nombreuses, donc rentable et important dans les revenus annuels. Avec la pandémie, le manque à gagner pour ce printemps est dans ma situation très important. Sans compter les projets de livres qui sont repoussés ou tout simplement mis au frigo. L’un de mes projets est pour le moment dans cette dernière situation, la coautrice étant actuellement trop inquiète pour s’y remettre. Et je ne peux pas lui en vouloir car le stress aussi est un facteur à prendre en compte. Au confinement en lui-même et à la peur du virus s’ajoute la peur de l’après. Je connais trop bien le monde du livre pour ignorer qu’il sera difficile, voire impossible, de placer un nouveau projet chez un éditeur. Difficile d’anticiper ce qu’il va se passer. Christelle Pécout – Crédit : Christelle Pécout Mercenaire de l’édition – par Nicole Masson, auteure de beaux livres et de livres pratiques, membre du groupement Lettres / Bande dessinée. Parmi les auteurs, il existe une catégorie à laquelle j’appartiens, celle des rédacteurs de livres sur commande. Qu’il s’agisse de livres pratiques ou de beaux livres, de livres encyclopédiques ou de livres de jeux et de divertissement, les manuscrits ne sont produits qu’à mesure qu’ils sont commandés et intégrés au programme d’un éditeur. À l’heure du confinement, toutes les maisons d’édition, grandes ou petites, retardent, diffèrent, déprogramment, et surtout ne lancent plus de nouveaux projets. Les mercenaires de l’édition comme moi en sont réduits à boucler les réalisations en cours sans savoir exactement quand ils paraîtront, à laisser en stand-by d’autres projets qui sont en suspens, à ne plus avoir d’interlocuteur pour lancer de nouveaux chantiers. Si on ajoute la saisonnalité de plus en plus forte dans l’édition, avec les livres-pour-se-faire-du-bien au printemps et les livres-à-offrir pour Noël, il est clair que les répercussions du Covid-19 vont se faire sentir jusqu’en 2021-2022. Nicole Masson – Crédit : Yann Caudal Peut-être, peut-être pas – par Bessora, vice-présidente du Snac, membre du groupement Lettres / Bande Dessinée, et présidente du CPE. Le 15 mars, situation anticyclonique, jusqu’en 2021 (et au-delà) : deux tiers d’à-valoir à percevoir sur un contrat de prête-plume, un autre contrat d’édition qui doit arriver dans la semaine, pour la parution d’un roman en janvier 2021. Mais encore, opportunité, à l’automne d’une « réécriture de traduction ». Et puis une présentation d’œuvre en mai 2020. Et cætera. Et soudain, confinement. Deux-tiers d’à-valoir gelés parce que la compta est fermée. Un contrat qui se fait désirer parce que l’éditeur a d’autres problèmes à régler. Présentation d’œuvre annulée. La réécriture de traduction n’est pas totalement foutue : l’éditeur a acheté les droits en Corée, mais il ne sait pas s’il va pouvoir les exploiter : parce que, et si 2021 était une année de surpublication, pilonnage de masse, et prix cassés ? Peut-être, peut-être pas, on ne sait pas. Bessora – Crédit : Jean-Hugues Berrou Doublage / Sous-Titrage / Audiodescription Réinventer demain – par Philippe Lebeau, vice-président de l’Union professionnelle des auteurs de doublage (Upad), membre du groupement Doublage / Sous-Titrage / Audiodescription. Le flux normal de mon travail d’auteur-dialoguiste s’est, avec la crise sanitaire, légèrement détendu. Je continue à adapter quelques épisodes de série déjà tournés, mais je n’en vois guère de nouveaux se profiler à l’horizon. Si des délais moins serrés donnent plus de temps pour peaufiner des détails, ils sont aussi l’indicateur que les enregistrements sont aujourd’hui bel et bien à l’arrêt. Beaucoup de mes confrères et consœurs se retrouvent sans activité, et l’absence de statut d’auteur se fait plus que jamais sentir : il rend extrêmement difficile l’accès aux aides de l’État et suscite des inquiétudes légitimes. Persuadé que nous sommes la réponse aux questions inédites que nous nous posons, je consacre une partie de ce supplément de temps à échanger, avec les organisations professionnelles où je suis actif, sur les dispositions à faire connaître aux auteurs pour bénéficier des aides d’urgence, et sur les actions à entreprendre pour nous coordonner et maintenir nos activités d’auteur en vie : les tournages étant à l’arrêt complet aux États-Unis, reste à évaluer quels films et séries sont en postproduction, ainsi que les solutions envisageables pour reprendre au plus vite les enregistrements de doublage dans des conditions sanitaires sûres et réalistes. Je consacre le peu de temps libre qui me reste à accorder la plus grande place possible à ce qui nous tient debout, à ce qui nous permet d’avancer : la réflexion, les proches, les plaisirs que l’on croyait acquis, l’écoute active de ceux qui sont plus que jamais loin. Le défi que représente pour moi ce confinement ? Concilier la difficulté d’accepter la fragilité de nos existences avec l’excitation de devoir, dès maintenant, réinventer demain. Philippe Lebeau – Crédit : Carole Cadinot Un passage à vide en 2020 mais aussi en 2021 – par Julia Borsatto, traductrice et adaptatrice de l’audiovisuel, membre du groupement Doublage / Sous-Titrage / Audiodescription. Pour ma part,